Le passage en
Mauritanie est un peu plus compliqué que la sortie du
Maroc mais on ne peut pas se plaindre. Évidemment,
c’est plus facile quand on connaît l’ordre des
formalités. On se fait taxer de 150 FRF pour une raison
obscure. La douane, elle, ne nous fait pas de problème.
Philippe déclare jusqu’au 1$ que nous avons en
devises.
Côté conduite, c’est l’angoisse. Il y a des mines
anti-chars et anti-personnels disséminées dans les
environs ; il ne faut pas quitter la piste. Ah
d’accord mais comment on fait ? Il n’y a que
des pistes et des traces de véhicules autour de nous. Si
toutes mènent probablement à Nouadhibou, ce n’est
pas forcément à la même vitesse, ni toujours sans
problème. Les véhicules partent dans tous les sens, il
y a des guides qui se proposent partout. C’est un
piège ou quoi ? Nous en avons 2 qui s’accrochent à
notre camion. Mais c’est clair qu’un guide est
indispensable. Les voitures s’ensablent à la
vitesse grand V. Un de nos 2 guides accrochés va aider
quelqu’un qui s’est ensablé ;
Il ne nous en
reste qu’un. Bon, de toutes façons, on n’a pas
vraiment le choix.En fait, le guide est gratuit mais il
nous emmène ou il veut. Finalement, le nôtre n’est
pas le pire, il nous emmène dans son hotel-campement. On
voit passer le fameux train le plus long du monde. On
peut estimer le nombre de wagons au nombre de motrices.
Une motrice tire 50 wagons. Comme le nôtre à 4
motrices, le train fait entre 150 et 200 wagons.
Ariver à Nouadhibou, il
faut constituer un convoi pour Nouakchott. Nous partirons
finalement avec Jean-Yves et Virginie, en Citroën AX qui
vont jusque Kafountine, en Casamance, Jean-Marc, Yves et
Marco en Peugeot 505 et Jean-Claude, en fourgonnette
Mercedès. Notre guide, c’est Mohammed.
|
Dimanche 26/11/2000
C’est le grand départ pour une piste
qui me fait peur. C’est pour moi un des 2 points
difficiles de notre voyage. Si notre camion
s’ensable sur la plage entre 2 marées, notre voyage
est terminé. A part ca, je sais aussi que l’on va
traverser la réserve naturelle du banc d’Arguin,
où les courants chauds et froids amènent une faune
tropicale une partie de l’année et une faune
européenne une autre partie. En ce moment,
ce sont les courants froids, et ce sont nos oiseaux
migrateurs qui viennent passer l’hiver ici. Plus
malins que nous, qui passons la plupart des hivers à
nous geler. Heureusement que j’ai lu un peu
d’explications sur le banc d’Arguin parce que
des oiseaux, finalement, on n’en verra pas avant
d’arriver à la plage et encore, on va pas prendre
notre temps. Notre guide est pressé et malgré tout ce
qu’on peut lui dire, il trace. Pourtant
c’était clair que personne ne voulait perdre sa
voiture ici. Nous, avec notre vitesse de max 70km/h, nous
perdons souvent les autres. Heureusement, ils
s’ensablent régulièrement et nous avons largement
le temps de les rattraper. En nombre, c’est
l’AX qui gagne mais elle est tellement légère
qu’en 5’, elle est sortie. Jean-Yves fulmine.
Le guide lui sort de partout. Ils s’ensablent tout
les km. Le plus chiant, c’est la Mercedes. Quand
elle s’ensable, elle est vraiment lourde à sortir.
En plus, notre guide joue à diviser pour mieux régner.
C’est toujours de la faute de celui qui n’est
pas là si on avance pas. Il nous prend pour des cons ou
quoi ? On ne peut pas dire que ce soit cool. C’est
fatiguant de désensabler et on a l’impression de
courir pour mieux s’arrêter ensuite. Nous allons
mettre 2 jours ½ pour atteindre la plage, soit un jour
de plus que prévu par notre guide. Tout le monde
s’en fout, parce qu’on n’était pas
pressé mais on a jamais pris notre temps au moment ou on
le voulait. Il fait chier tout le monde, avec ses
manière de chef de colonie, mais bon, c’est lui qui
connaît la piste et puis, l’eau commence à se
faire rare. Il faut quand même arriver.
Ah oui, c’est vrai,
en chemin, une Mercedes avec des pneus pourris,
probablement volée, s’est ajoutée à notre convoi.
En plus de désensabler, il faut aussi réparer les
pneus. Tout le monde râle et ceux-là, on finira par les
laisser. On ne traverse pas le désert avec même pas un
cric, ni de quoi regonfler ses pneus . Ils n’ont pas
d’argent avec eux, pas d’huile (mais ils en ont
besoin), etc.… Des parasites . En plus, ce sont des
saharawouis, donc, ils savent très bien ce qu’ils
font. Ils s’accrochent à un groupe qui passe et ils
sucent jusqu’à ce qu’on les jette. Vraiment,
c’est pas du tout une partie agréable du voyage.
Enfin, le mardi midi, nous
atteignons la plage et le village de pécheurs. Il faut
attendre que la mer descende pour pouvoir rouler sur le
sable durci, entre les vagues. De notre camion, vraiment,
c’est géant. Nous sommes assez hauts pour ne pas
avoir trop de vagues qui nous transpercent (bien que des
fois …) et il y a plein de bancs d’oiseaux qui
s’envolent à notre passage.
Just a problem, tout au
début de la plage, les freins nous ont lâchés. Nous
roulons sans freins (c’est Philippe qui angoisse
ferme. Il apprécie moins que moi ce passage. Pour moi,
c’est confort). Bon, relativisons, la plage,
c’est la deuxième route principale de Mauritanie,
il y a de la circulation mais tout de même pas de
bouchon… c’est pas Bruxelles à 8h30 …
Quand je dis que c’est confort pour moi, je sais
tout de même que nous sommes sur la partie délicate.
C’est ici qu’il est interdit de
s’ensabler. Nous n’aurons jamais le temps de le
sortir avant que la marée ne remonte.Donc, je prie quand
même pour que tout se passe bien. Ma foi, ca marche
assez bien.
Ah oui, à un moment, il
y a un panneau virage dangereux (je vous rappelle, on
roule sur la ligne sable-mer, mais il y a un panneau
virage dangereux…). Si on ne le vois pas et
qu’on ne ralentit pas … on se jette à 70 km/h
dans la mer…
On ne l’avait pas
vu mais ouf, on avait vu qu’il y avait des rochers
dans ce coin-là et on a pu ralentir et tourner à
temps… Heu, quand même, ca fait peur…Le
virage, il fait 90 degrés…Aun autre moment, il y a
des dizaines de pirogues de pécheurs qui se préparent
à se mettre à la mer et là aussi, il faut ralentir et
faire attention. On aperçoit Nouakchott au loin mais on
dirait que la marée commence à remonter. A
l’arrivée à Nouakchott,cette fois-ci, ce sont des
centaines de pirogues qui nous barrent le chemin, et
personne ne sait comment il faut faire pour sortir de la
plage. Notre guide nous rejoint pour nous montrer le
chemin (on ne saura jamais s’il est payé pour nous
emmener là) et c’est notre deuxième
ensablement…Mais là, on est dans le caca…en 3
minutes, nous sommes entourés par des nuées de
gamins/ados/jeunes adultes qui veulent bien nous aider
… contre monnaie sonnante et trébuchante
(c’est de bonne guerre, c’est normal et de
toutes façons, d’une manière ou d’une autre,
à un moment donné, nous n’auront plus le choix).
Mais c’est des dizaines de jeunes tout excités qui
nous crient dessus pour discuter les prix, qui sont tout
de même n’importe quoi. Nous essayons de nous
dégager nous-mêmes, des jeunes et du sable, bien
énervés après la tension de la traversée et cette
arrivée en … queue de poisson. Depuis le début,
nous nous méfions de notre guide, on se demande si ce
n’est pas un guet-apens (bon, d’accord, vu
froidement plus tard, c’est notre parano qui nous a
soufflé çà). Après au moins ½h d’essais
infructueux ( mais le temps n’a plus la même
valeur), nous nous décidons et trouvons un accord (et je
vous assure que c’est du sport parce qu’il faut
trouver le chef de bande et faire taire les autres qui
crient dans tous les sens) Nous sommes alors tirés
d’affaire en … moins d’une minute.
|
Mercredi 29/11/2000
Nous sommes toujours à Nouakchott, chez
Sedati et Marie, un couple Mauritano-français que
connaissent Virginie et Jean-Yves. Durant la traversée,
nous avons appris à nous apprécier. Pelleter et
pousser, ca crée des liens. Nous passons une soirée
chez leur ami, Seth, où nous mangeons pour la première
fois du chameau (c’est bon, vous pouvez y aller sans
crainte) et discutons de la liberté de la femme dans le
monde mauritanien … En résumé, les couples se
choisissent, divorcent facilement et se remarient tout
aussi facilement, c’est courant. Normalement, les
enfants restent avec leur mère et ca ne posera
qu’exceptionnellement des problèmes pour le
remariage. Dans une vie, on a facilement 4-5 maris ou
épouses (1 à la fois). Pour la liberté des
célibataires féminines, les avis sont plus partagés.
Une femme n’habite jamais seule, ca ne se fait pas.
Voila, la minute philosophique est terminée mais nous
nous devions de vous faire partager nos connaissances
fraîchement acquises.
|